Son aventure débute il y a environ 20 ans. À l’époque, il brassait à la maison à un rythme de 3 à 5 fois semaine avec une rotation de 8 à 10 recettes. Ce modèle est demeuré ainsi un certain nombre d’années.
Par la suite, le moment était venu d’établir les fondations de la microbrasserie. Frédéric Cormier a tenté de le faire un peu partout au Québec, mais comme il le mentionne, la bière de microbrasserie n’avait pas la cote qu’elle détient désormais il y a une quinzaine d’années.
« La bière, à ce moment, c’était mal vu. Une microbrasserie était considérée comme un bar. On a cherché de Saint-Jérôme à Saint-Stanislas en passant par Drummondville, jusqu’en Estrie, et même à Montréal. C’est à L’Assomption qu’on a pu s’installer en 2006. »
Dès son premier Mondial de la bière, Hopfenstark se fait reconnaître en gagnant une médaille avec la Ostalgia Blonde, ce qui lui a ouvert les portes des États-Unis. « Tout de suite, des exportateurs nous ont approché. On trouvait ça d’ailleurs un peu bizarre. On est allé ensuite au Vermont Brewers Festival en 2009 et on a commencé à exporter la même année. »
La Station Ho.St, un lieu de communion
Hopfenstark s’est agrandie en 2013 avec l’ouverture d’un pub à Montréal : La Station Ho.St. Ce lieu de communion aura été un endroit où les souvenirs et les moments mémorables se sont enchaînés jusqu’à sa fermeture, en juin 2021.
« C’était extrêmement exigeant. On travaillait 7 jours sur 7. Nos produits avaient d’ailleurs disparus des tablettes parce que 85% de notre volume était pour le pub. »
Son plus beau souvenir vient du fait que les gens de tous horizons convergeaient vers le pub pour discuter autour d’une bière. Il se souvient particulièrement d’un homme de 80 ans qui visitait l’endroit chaque semaine.
« Il venait manger un hamburger et me disait que les nôtres lui rappelait ceux de sa mère. Il régnait un esprit de communion. Tout le monde se parlait et c’est ce qu’un pub doit être à la base; la bière est accessoire », ajoute-t-il.
En 2018, trois ans avant sa fermeture, Hopfenstark déménage à Lavaltrie, où elle se situe toujours, au 1970 rue Notre-Dame. La même année, la microbrasserie effectue un retour en tablette et fera la transition vers la canette l’année suivante.
L’Europe comme terrain de jeu
Frédéric Cormier ne s’en cache pas, il a un faible pour les bières du Vieux Continent. Il en a fait la ligne directrice de Hopfenstark.
Le nom de la microbrasserie provient justement de l’Allemand, cette langue qui permet la fusion de plusieurs mots pour en créer un qui fait tout son sens.
« La plupart des microbrasseries ont un nom qui découle du judéo-chrétien, avec des mots comme Saint, Diable, Dieu, alors qu’au Québec on se dit athée. Pourquoi on perpétue cette tradition? Notre nom est donc une ouverture sur le monde », explique-t-il.
Il renchérit en mentionnant que souvent, plusieurs de ses bières étaient en avance sur les modes. Les lagers, Helles et Svetly, qui connaissent énormément de succès récemment, faisaient partie de sa rotation depuis des lustres, dont la Helles, qu’il brasse depuis 2009.
« La Boson de Higgs, une BerlinerRauchSaison, donc une bière fumée, sure et de saison, qu’on fait depuis 2010, on devait l’exporter aux États-Unis parce que personne n’en voulait ici. Maintenant, elle est connue dans plusieurs pays et est souvent citée dans les livres de bières. »
Divisé en deux mots, Hopfen veut dire houblon, tandis que Stark veut dire fort. De plus, trois mots dictent sa ligne de pensée : Qualité, Intégrité et Fraternité. « Qualité des produits, intégrité dans tout ce que tu fais et fraternité dans le sens où tout le monde se parle », explique-t-il.
En terme de qualité, Hopfenstark a gagné de nombreux prix au fil des ans, notamment au World Beer Cup, qu’il considère comme les « Jeux olympiques de la bière ». La Saison Station 55, une bière sèche de type saison belge, a remporté la médaille d’argent en 2012 dans cette catégorie, de même qu’une médaille d’or en 2010 au Mondial de la bière.
La Helles a été à de nombreuses reprises primée. Elle a gagné la médaille d’or au Mondial de la bière en 2021, et a reçu la médaille d’argent en 2011 et la médaille de bronze en 2017 au Canadian Brewing Awards.
L’intégrité, dans les mots de Frédéric Cormier, est de « prendre le temps ». « Une Svetly, pour qu’elle soit à son paroxysme, ça prend 4 mois à faire, pas trois semaines. Un jour au pub, un Allemand m’a dit que la Ostalgia blonde, notre Kölsch, goûtait comme à la maison, parce que j’utilise que des produits de Cologne pour la confectionner. »
De plus, lorsque le pub était en opérations, Frédéric Cormier a indiqué que trois températures différentes étaient en service pour les bières, avec une gazéification spéciale pour chacune d’elle, afin de respecter le style.
Enfin, la fraternité revient à ce qui a été mentionné plus haut concernant le pub Station Ho.St. Lorsque les histoires sont primaires et la bière secondaire, c’est qu’il s’agit d’une réussite. Même si celui-ci a fermé ses portes, on retrouve cette même fraternité en franchissant celles de Hopfenstark à Lavaltrie. Et si il se trouve que le grand manitou derrière cette microbrasserie qui aura 18 ans en 2024 est sur place, vous comprendrez toute l’étendue de ces trois mots.